VEF Blog

Titre du blog : Le blog d'un français non pratiquant
Auteur : abstentiovotepiednoir
Date de création : 21-03-2011
 
posté le 04-11-2011 à 03:10:03

Guerre d’Algérie : les derniers secrets;

 

 

 

Dans son livre choc, "Un silence d'État" (Soteca-Belin),

l'historien Jean-Jacques Jordi dévoile des centaines d'archives interdites d'accès. Cinquante ans après, celles-ci remettent en question la vision à sens unique propagée jusque-là sur la guerre d'Algérie.

 

C'est un historien réputé, plutôt classé à gauche, qui a eu la lourde tâche de "fouiller" les archives inédites de la guerre d'Al­gérie.

 Docteur en his­toire, enseignant, no­tamment à l'École des hautes études en sciences sociales, auteur d'une dizaine d'ouvrages et de plusieurs documentaires télévisés consacrés à ce conflit (France 2, France 3, M6), Jean-Jacques Jordi, 56 ans, n'a rien d'un "extrémiste" - d'une cause ou d'une autre.

« Mon travail est scientifique, dit-il. 

Je ne suis ni un juge qui décide "c'est juste ou injuste" ni un religieux qui décrète "c'est bon ou mauvais". »

Raison pour laquelle Re­naud Bachy, président de la Mission in­terministérielle aux rapatriés, l'a ex­ceptionnellement autorisé il y a quatre ans, au nom du gouvernement, à plonger dans ces archives, normalement interdites d'accès pour une période allant de soixante à cent ans.

 

Centre historique des Archives nationales, Service historique de la Défense, Service central des rapatriés, Archives nationales d'outre-mer, Centre des archives contemporaines, Centre des archives diplomatiques, Comité international de la Croix-Rouge: en tout, ce sont près de 120000 documents administratifs classés "très secret", "secret" et "secret confidentiel" que Jean-Jacques Jordi a pu consulter et photographier.

 

 Ras­sem­blés (pour partie) dans son livre, Un si­lence d'État, dont Va­leurs ac­tuelles pu­blie des ex­traits en ex­clusivité, le résultat de son en­quête et les documents qu'il porte au­jourd'hui à la connaissance du public sont absolument stupéfiants.

 

 Pourtant spécialiste de la question, lui-même le reconnaît:

« Jamais, confie-t-il, je n'aurais imaginé découvrir de tels faits. »

 

Depuis près de cinquante ans, l'histoire de la guerre d'Algérie s'écrit en noir et blanc:

d'un côté, les "gentils" (le FLN et les partisans de l'indépendance), de l'autre, les "méchants" (les pieds-noirs et les défenseurs de l'Algérie française).

 Les travaux de Jean-Jacques Jordi remettent totalement en question ce manichéisme mémoriel.

Non pour ré­habiliter une violence par rapport à une autre, mais pour rétablir une vérité autrement plus complexe que celle propagée de­puis 1962.

« Jusque-là, la thèse officielle était que l'OAS, refusant les accords d'Évian, avait plongé l'Algérie dans la terreur, légitimant la riposte du FLN, rap­pelle l'auteur.

 Cela n'est qu'en partie vrai. D'abord parce que le terrorisme FLN a précédé celui de l'OAS, mais aussi parce qu'il a été beaucoup plus meurtrier.

 Ensuite, sous pré­texte de lutte anti-OAS, le FLN et l'ALN (Armée de libération nationale) se sont essentiellement livrés à des exactions dirigées non contre les activistes, mais de manière aveugle contre l'ensemble de la population -

l'instauration de ce climat de terreur ayant pour but avoué de précipiter le départ des Français, y com­pris après le 19 mars (cessez-le-feu) et le 5 juillet (indépendance). »

 

Documents parfois terribles à l'appui, Jean-Jacques Jordi révèle une "autre" guerre d'Algérie, où les "héros de l'indépendance" - tout du moins une par­tie d'entre eux - livrent la face obscure de leurs méthodes: enlèvements, viols, tortures, actes de barbarie...

 Jusqu'à ces « quarante Européens séquestrés » jus­qu'à ce que mort s'ensuive pour servir de « donneurs de sang » aux combattants FLN.

 

 Ces faits, démontre l'ouvrage, étaient connus, et même soutenus, par les dirigeants algériens de l'époque. Aussi incroyable que cela puisse paraître, écrit-il,

« il n'y eut aucune poursuite judiciaire de la part de la justice algérienne contre ceux qui s'étaient rendus coupables d'exactions ou de meurtres ».

 

Mais les archives secrètes  n'épargnent pas non plus les autorités françaises et le rôle des "barbouzes" envoyés sur place:

 oui, des Français ont torturé d'autres Français;

oui, des listes de militants supposés de l'OAS ont été transmises aux insurgés;

 oui, des ordres ont été donnés afin de ne pas intervenir, con­damnant à mort des centaines d'hommes, de femmes et d'enfants...

 Au-delà de la passivité, une véritable complicité.

 Comment qualifier autrement l'attitude - révélée par un rap­port - de ces gendarmes mobiles ren­dant à ses bourreaux FLN un ressortissant français « torturé à l'électricité et battu » qui était parvenu à s'enfuir et  à se réfugier dans leur cantonnement ?

 

« Que la raison d'État - des deux côtés de la Méditerranée - l'ait emporté sur quelques milliers de vie, cela n'est pas propre à la guerre d'Algérie, au moins faut-il le reconnaître », écrit Jean-Jacques Jordi.

 

 

Pas plus que les événements ne le furent, la repentance ne peut pas, et ne doit pas, être à sens unique.

Cinquante ans après, le moment est sans doute venu pour l'Algérie, comme pour la France, de reconnaître ce que fut - aussi - ce conflit:

le martyre des pieds-noirs et des harkis.

Nicolas Sarkozy s'y était engagé en 2007 à Toulon lors de sa campagne électorale.

Osera-t-il, à l'occasion des cérémonies du cinquantenaire, braver le "politiquement correct", aujourd'hui clairement désavoué, et tenir sa promesse ?

 Arnaud Folch

À lire également dans "Valeurs actuelles" :
Document. Ces vérités occultées par les archives 

À lire également sur valeursactuelles.com :
Pieds-noirs : une blessure française, par Arnaud Folch
Pieds-noirs : la blessure toujours ouverte, par Arnaud Folch
Thierry Mariani : le FLN coupable de crime contre l'humanité, par Josée Pochat

 

 

J.J Jordi

 

Les Pieds Noirs, histoires d'une blessure

DUREE: 3x52 (2x80) minutes ANNÉE: 2006 AUTEUR(S): Gilles Perez RÉALISATEUR(S): Gilles Perez, Karine Bonjour MONTAGE: Laurence Generet, Sylvie Laugier, Elisabeth Sacier CREATION MUSICALE: Barrio Chino  

SYNOPSIS

Les Pieds Noirs, histoires d'une blessure est composé dans sa majeure partie de témoignages et d'archives familiales. C'est un film qui relit l'histoire de l'intérieur, dans une polyphonie sensible et intime.

La première partie, « Les années romantiques », raconte l'épopée de l'installation en Algérie. Elle décrit les conditions parfois extrêmement dramatiques dans lesquelles les familles ont abordé cette terre inhospitalière pour en faire leur nouveau sol natal, fuyant un régime politique ou une situation économique difficile. Elle raconte le mixage de ces populations venues de toute l'Europe, qui vont finir par constituer la culture et l'identité Pied-Noir. Elle en montre la vie quotidienne, les aspirations, les luttes, les joies et les difficultés. Au‑delà du folklore Pied-Noir, elle permet de saisir comment une culture naît et se développe. C'est à la fois une étude sociologique, politique, culturelle et profondément humaine de la vie en Algérie, mais aussi de la France, de l'Europe et d'une époque.

La deuxième partie, « Les années dramatiques », retrace les dernières heures des Pieds-Noirs en Algérie, les drames ultimes qui vont amener à la décision du départ et à l'arrachement vers un nouvel exil : familles victimes d'assassinats ciblés ou d'attentats aveugles, fusillade du 26 mars 1962 (l'Armée française tire sur les civils qui manifestent rue d'Isly à Alger), enlèvements d'Européens, chasse à l'homme du 5 juillet 1962 (dans l'euphorie des fêtes de l'Indépendance, quelques uns règlent leur compte aux Européens d'Oran), disparitions d'Européens (plus de 3000 enlevés ou tués, dont la famille ne saura jamais ce qu'ils sont devenus). Les autres événements qui jalonnent la guerre sont volontairement éludés pour se concentrer sur les Pieds-Noirs. Puis l'on y suit les familles rassemblant quelques effets à la hâte et quittant l'Algérie à bord de bateaux trop rares et bondés.

La troisième partie, « Les années mélancoliques », raconte le départ, le voyage et l'arrivée en Métropole. En France, rien n'est prévu. Au lieu d'être accueillis par la Mère patrie, les Français d'Algérie se heurtent à l'hostilité de la population française et à la suspicion de l'État. Pour beaucoup, les conditions d'hébergement des premiers mois vont être terribles. L'éparpillement des familles en Métropole, la mauvaise image des Pieds Noirs et le racisme dont ils sont victimes provoquent ensuite dépressions et silence. Convaincus de ne pas revenir, les Pieds-Noirs chercheront alors à s'intégrer à tout prix et laisseront, pendant des années, les rumeurs, les idées fausses et les moqueries se multiplier.

Un documentaire coproduit par France 3 Aquitaine, Corse, Limousin Poitou-Charentes, Méditerranée, Normandie, Sud et France 3 national - Avec l'aide du Département des Bouches du Rhônes, de la Région PACA et la participation du CNC.

Prix du Jury Lycéen au Festival International du Film d'Histoire de PESSAC 2007
Nominé au Festival International des Programmes Audiovisuels (FIPA) 2007

Pour plus d'information sur le film (l'édition DVD, les bonus, les photos...), rendez-vous sur le site : www.lespiedsnoirs-lefilm.com.